Je vous propose de mettre de temps en temps quelques histoires ou légendes mythologiques ayant un rapport avec l’astronomie.
Les légendes catalanes sont généralement orales, imprégnées par la vie de tous les jours et les croyances de leur époque, période allant du moyen âge au XIXe siècle. Elles ont été recueillies par Joan AMADES et traduites par Marlene ALBERT-LLORCA dans un livre intitulé “DES ETOILES AUX PLANTES”, paru aux éditions du Mirail.
Voici la version française d’une petite légende astronomique de marins catalans :
Un capitaine de bateau demande régulièrement à son mousse de lui faire cuire une friture de poissons, cependant il n’arrive jamais à la manger, car le mousse ne peut pas garder sa friture dans sa poêle qui se retourne tout le temps, versant tout par-dessus bord. Les marins lui répondent que le jour où il y arrivera, ce sera la fin du monde.
Cette histoire se raconte aux enfants sous les étoiles, car chez les marins, la Grande Ourse est une “panna”, une grande poêle qui sert à faire la cuisine. L’observation du déplacement circumpolaire de la “panna” donne un autre sens à l’histoire, que ne manquent pas de relever les enfants.
Pour compliquer les choses l’astronomie catalane se décline en histoires de marins, de paysans et de montagnards, sans compter les particularités régionales. C’est très riche, même un peu trop pour tout savoir !
Dans une époque lointaine et après une année de catastrophe climatique, les récoltes furent perdues.
Les paysans affamés se rendirent chez le dernier marchand pour lui acheter son stock de blé, cependant, par cupidité, celui-ci tripla le prix, ce qui provoqua la grogne des paysans.
Pour vendre à prix fort son blé, il chargea son chariot et s’en alla pour le cacher. Mais, là-haut, le Bon Dieu, mécontent de son geste, fit renverser son chariot, pour que tous les paysans puissent ramasser le blé et nourrir leurs familles.
De plus, comme punition, il condamna le marchand à conduire son chariot pour l’éternité dans les cieux.
D’ailleurs, si vous voulez le voir, il est encore sur un des chevaux de l’attelage, à diriger son chariot en marche arrière.
Si vous regardez bien ! Vous le verrez sur l’étoile d’Alcor !
Ce matin, en accompagnant mon fils a la Sardane (comme tout bon catalan), un superbe “arc de Sant Marti” nous a ouvert le chemin. “L’arc de Sant Marti”, par Joan de la Ronya Barcelone 1918, tiré du livre “des étoiles aux plantes” de Amades.
Un jour, Saint Marti” et le Diable firent un pari, à qui ferait le plus beau et le plus grand arc dans le ciel. Sant Marti prit un cristal des plus pur et d’un trait peignit un arc qui avait des couleurs éclatantes et splendides.
Le diable passa beaucoup plus de temps à faire le sien, qui, plus petit, passait sous celui de Sant Marti. Il le fit dans de la glace, il ne brillait pas autant que l’arc de Sant Marti, et de plus, au soleil, il s’effaçait tout de suite.
Quant à l’arc de Sant Marti, lorsqu’il s’efface, il tombe dans le liseron “el correjola” : si on arrive à trouver le pied du liseron, on voit les couleurs de l’arc de Sant Marti brillant pendant très longtemps. Et, si on attend la disparition de toutes les couleurs, pour celui qui est assez patient, un immense trésor rendra sa vie heureuse jusqu’à sa mort…
On affirme aussi que l’homme qui passe sous l’arc de Sant Marti devient une femme et inversement.
On prétend enfin que lorsque les couleurs de l’arc de Sant Marti brillent au point de projeter de la lumière sur la terre, cela présage d’un grand bonheur et d’une grande prospérité pour la collectivité, si c’est le contraire, aie… “Madre de Diou !!! Mal de capsss”, famines, guerres, tremblements de terre, tempêtes et malheur pour tous.
Tant que l’arc du diable apparait après et disparait avant celui de Sant Marti, “tot ba béééé”, tout va bien !!!
Alors guettez toujours l’arc de Sant Marti, le contempler vous apprendra beaucoup.
Une histoire de marins de “el guinyanyu” barcelane, 1910, tirée “d’astro.nomia” de Joan Amades. ESTEL DEL MORO, l’étoiles des Maures, d’où vient son nom ?
Il y a bien longtemps vécu un fantastique pirate maure qui semait la terreur sur notre belle “mare nostrum”. Il avait une étoile qui le protégeait : elle ne sortait que lorsque la tempête menaçait.
Comme il était prévenu à temps de tous les dangers que la mer occasionne, il était toujours à l’abri des éléments naturels. Le pirate était considéré du coup comme un très grand navigateur.
Les marins de “nostre pays” connaissent encore aujourd’hui l’étoile du maure : elle ne sort que deux fois par an, quand on ne voit plus la côte, vers le minuit et en penchant un peu vers l’ouest. Sa présence est tenue, par les marins, pour un signe de mauvais temps.
Il est possible que le protagoniste de ce récit soit le célèbre brigand arabe “BRIJANT” qui fit régner la terreur sur la méditerranée au Moyen Âge, et dont le souvenir s’est perpétué dans les contes et légendes, jusqu’à nos jours !
Cette étoile pourrait être “Canopus”, qui réunit les conditions signalées par la tradition populaire.
J’avoue n’avoir pas vérifié si c’est possible. Si quelqu’un veut s’en charger, on pourrait le vérifier ?
Une petite histoire “romancée” sur la fête de l’orange, qui a lieu le troisième dimanche de janvier à Banyuls bien connu, depuis les Romains pour autre chose que les oranges, mais seulement avec modération. Elle a un rapport avec l’étoile, que l’on nomme Capella du Cocher.
“Un jour que le Petit Jésus se promène avec sa maman dans une orangeraie de Banyuls, il demande à sa mère de lui cueillir un de ces beaux fruits orange.
Sa maman tend la main et cueille une “tarongeta” (petite orange) et la lui tend. Par maladresse, elle lui échappe et roule jusqu’à la mer qui emporte le fruit.
Le Petit Jésus et sa maman regardent le fruit partir au large, de plus en plus loin, jusqu’à ce qu’il disparaisse, lorsque celui-ci, ho surprise ! se mit à s’élever dans le ciel, avec les autres étoiles.
Depuis ces temps anciens, les Catalans appellent cette étoile, légèrement orangée “la tarongeta del mer jésus” ou “estel tarongeta”. En français, l’étoile de la petite orange de la mère de Jésus, car si vous regardez bien les étoiles et particulièrement celle-là, vous vous apercevrez qu’elle a une couleur jaune orange
Rendez-vous à la fête de l’orange, il y a toujours quelques bonnes pâtisseries à base de tarongeta, que l’on pourra honorer avec un bon verre de banyuls !
Une histoire de Josep Mas, de Palma de Majorque (1922).
Cette histoire doit être remise dans son contexte, qui est celui du Moyen Âge, et elle concerne la Couronne Boréale, appelée chez nous “estels de la corona del rei Jaume”. La couronne du roi Jaume ! Seuls peuvent la porter les rois qui ont chassé les Maures de Majorque.
Il n’y avait plus de Maures dans les îles, lorsque le grand roi Jaumes y mourut et voulant éviter qu’un envieux ne s’arroge sa couronne sans l’avoir mérité, il l’emporta au ciel afin que personne ne puisse la prendre.
Mais, si jamais les Maures revenaient un jour envahir notre pays, le roi qui les en chasserait, recevrait cette couronne du ciel.
“Estel margarida” ou “estell magarita”, du livre de Joan Amades, “des étoiles aux plantes”, d’après madame Rosa Badia, Sarral 1918.
C’était une jeune fille paresseuse qui, lasse de filer, cassa sa quenouille et épointa son fuseau.
En punition, elle fut changée en étoile, pour que les fileuses dont le travail est primordial en prennent de la graine et ne gâchent pas le travail fourni par d’autres en amont !
Certains l’appellent aussi “estell de les filadores”.
Nous connaissons cette étoile de nos jours sous le nom de “gemma” dans la constellation de la Couronne Boréale, qui dans certaines contrées de “nostre payss” s’appelle comme son étoile principale “el Marguerita” la Marguerite.
La Voie lactée, que l’on nomme “chemin de Saint-Jacques” est une appellation que les Bretons utilisent aussi.
Un jour, Saint-Jacques se plaignit à Notre Seigneur d’avoir son sépulcre à une extrémité du monde si éloignée de là où sont enterrés ses amis, que personne ne pourrait trouver sa tombe et lui rendra visite.
Le Seigneur lui répondit que, pour aussi loin que soit son lieu de repos, tout le monde irait lui rendre visite et, pour que les vivants trouvent leur chemin, il créa le chemin de Saint-Jacques sur la sphère céleste, pour qu’il indique le chemin éternellement.
Ainsi, toute âme peut entrer au Paradis après s’être rendue sur la sainte sépulture de Saint-Jacques. Effectivement, depuis la catalogne, la Voie lactée sert bien de guide pour se rendre en “finis terre” en Galicie, au sépulcre du saint apôtre.
En Bretagne et dans d’autres régions d’Europe, on dit la même chose, mais s’ils avaient réellement suivi la Voie lactée, ils seraient bien arrivés ou finit la terre, mais pas forcément en Galicie.
“Estel molto” ou le Bélier, de Salvador Vilarrassa, pobla de Lillet, 1935. Voilà une histoire qui est en relation avec celle de la toison d’or, mais à la sauce catalane.
Autrefois, cette étoile était un mouton avec de la laine d’or, très envié de tout le monde, au point que son berger n’était pas tranquille, ni le jour ni la nuit, à toujours surveiller qu’on ne le lui vole pas.
De peur de le perdre, il ne pouvait plus vivre tranquille, si bien qu’un jour, il l’envoya au ciel, afin que chacun puisse le voir et que nul ne se l’approprie. Mais, voilà que, lorsqu’il voulut le faire redescendre pour pouvoir en profiter, il ne se rappela plus comment il avait fait pour le changer en étoiles et ne put en reprendre possession.
Celui qui parviendra à rompre l’enchantement sera richissime, car le mouton grandit chaque année et depuis le temps qu’il est enchanté, il est devenu si gros qu’en le tondant, on en tirera un tas de laine plus haut qu’une montagne.
Ça me rappelle aussi, étrangement les fables De La Fontaine ! C’est là que l’on voie, que la catalogne est une terre de passage, entre le sud et le nord, un couloir naturel pour toutes les migrations, qui laissent toujours une trace dans la mémoire populaire, un “pays” d’échange et d’ouverture “al altres! molt sort por tot homs !”
Savez-vous pourquoi la Lune est couleur cendre ? Le Soleil, qui en avait assez d’être célibataire, voulait se marier et il demanda alors la main de la Lune.
Quand on apprit dans le ciel que le Soleil se mariait, toutes les étoiles eurent envie de savoir qui était sa promise. Le bruit courut un jour que la Lune devait passer par là et toutes les étoiles se massèrent dans un coin pour la voir. La Lune allait, enveloppée dans un voile de nuages.
En entendant le vacarme que faisaient les étoiles, elle crut qu’elles l’attendaient pour faire sa connaissance et, afin de mieux se faire voir, elle se dévêtit de ses nuages.
Toutes les étoiles restèrent ébahies de sa beauté. Elles en parlèrent tant, que le bruit de leurs conversations parvint aux oreilles du Soleil. Ayant appris ce qu’il s’était passé, il alla trouver sa promise, lui parla ainsi : « la vanité a eu plus de pouvoir sur ton cœur que la décence, et pour qu’on puisse mieux te voir, tu as retiré le voile qui te couvrait. Tu ne seras donc jamais ma femme et plus jamais tu ne seras aussi belle », et lui jeta à la figure une poignée de cendres. C’est depuis lorsque la lune a la face couleur cendre.
Une petite histoire sur l’origine de “l’oie de sainte Eulalie” (estel oca de santa eulàlia) trouvée au fond d’une page du livre de Joan Amades, “des étoiles aux plantes”.
Une oie très aimée de la sainte patronne de notre ville fut mise en prison avec elle et assista à son martyre. Pour ne l’abandonner ni dans la mort ni dans la vie, elle monta au ciel avec elle ou elle lui tient encore compagnie.
Cette étoile gagne en luminosité jusqu’au jour du martyre de la sainte, le 12 février, qui est celui où elle brille le plus pour rappeler aux fidèles le sacrifice de la martyre. Passé cette date, elle disparait pour ne ressortir qu’à la Noël suivante. Conceptio Angerri. Barcelone, 1922
Malheureusement, je n’ai pas encore vérifié de quelle étoile il s’agit ! Je laisse toujours passer la date !!!
Un petit proverbe catalan pour les bergers et montagnards.
“Quan els cabrelles, es ponen a l’hora de sopar, pastor a la montanya ,ha de tornar”. Quand les chevrettes, se couchent a l’heure de souper, le berger à la montagne doit retourner.
Pour les montagnards ces sept étoiles sont les premiers bergers qui existèrent, ceux qui enseignèrent a tous les autres l’art de garder et de conduire les brebis. Du haut du ciel, ils regardent si leurs héritiers suivent bien leurs conseils et traitent le bétail comme Dieu le veut.
S’il arrivait que les bergers ne le fassent pas, ils descendraient à nouveau sur la montagne pour recommencer leur enseignement et, si les bergers ne les écoutaient pas, ils leur enlèveraient leurs troupeaux. Josep Planes Rippol 1918
“Pastoret”, écoute bien les conseils des pléiades, il y va de ta sécurité !
Une autre légende de Joan Amades, toujours tirée du livre “des étoiles aux plantes”, cette fois, c’est sur la Petite Ourse en catalan : “carro petit del cel”.
C’était un soir de bal, des jeunes filles dansaient sur la place du village. Voilà qu’en plein milieu du bal, le Saint Sacrement vint à passer. Le musicien, en homme de bien, et par respect, cessa de jouer.
Mais, ces demoiselles le frappèrent et le maltraitèrent et le pauvre musicien dut se résoudre à continuer de jouer. En punition de ce sacrilège, les sept danseuses furent changées en étoiles.
10, rue des Iris 66270 Le Soler